F DARD

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ATTENTION UN SAN-ANTONIO PEUT EN CACHER UN AUTRE 2/2

Un San-Antonio peut en cacher un autre (suite)

Revenons sur les raisons qui me font penser que la signature de Frédéric VALMAIN dont la production s'étale de 1955 à 1986 tant au théâtre sous ce nom qu'au Fleuve Noir sous le pseudo de James Carter et de Frédéric Valmain, dissimule en réalité l'écriture de Frédéric Dard.

Les livres de cet auteur m'intriguaient par leur présence dans les vieux fonds de bouquiniste de ma région où ils côtoyaient les premiers numéros de la série " La Loupe " (parmi lesquels se trouvaient sous divers pseudos des textes de F.Dard).

J'ai lu quelques Frédéric Valmain de chez Arthème Fayard et Denoël, j'ai trouvé une qualité et un style que j'aimais, qui me rappelait par son non conformisme et ses sujets plus "humainement noir" que policier, Frédéric Dard.

Or, pour un amateur éclairé, les anomalies éditoriales ne manquent pas.
J'ai donc cherché, je suis tombé sur la préface des "Pires extrémités" qui m'a procuré un élément fort, conforté par la lecture de cette longue nouvelle parue dans " A la page " N°27 de septembre 1966 :
" Excellent 'policier' que ce Frédéric Valmain, Les pires Extrémités. Mais qui est le plus surprenant, du personnage ou de l'auteur ?
Car Frédéric Valmain est le Frégoli des lettres françaises. Auteur de romans policiers appréciés, père de l'inénarrable Bérurier de San-Antonio, historien d'une Histoire de France des plus cavalières, dramaturge abonné à tous les succès, tantôt Valmain, tantôt Dard, tantôt San-Antonio, le plus souvent Frédéric, il est lui-même le plus picardesque de ses personnages. "
Cette préface explicite n'a pas été démentie, tout au moins jusqu'au N° 66 de décembre 1969 paru trois ans plus tard, qui reconnaît qu'il y a un mystère éditorial sous la signature Valmain/Carter, et qui tente de noyer le poisson, malheureusement, l'explication n'est pas convaincante et n'abuse que ceux qui veulent bien l'être.

Enumérons :

Aucun renseignement sur l'auteur ni chez Arthème Fayard, ni chez Denoël, ni chez Dullis, mais une bibliographie étonnante, couvrant tous les domaines de l'écriture :

Au théâtre : un palmarès sans égal, l'auteur adapte Simenon, J.H. Chase, Pierre Mac-Orlan (qui préfaçait " L'homme traqué" de F.Dard), Boileau-Narcejac ; sa pièce Meurtre e fa dièse est préfacé par Jean Cocteau (l'avant-scène N°190 de février 1959), chaussant les bottes de Dard.
Au cinéma : idem, cet auteur débutant suscite les films et traite avec les metteurs en scène à succès.
En même temps, d'une discrétion totale, il faut attendre 1976 et le 21ème titre au Fleuve Noir (Johnny Madame) pour avoir droit à une notice biographique avec une naissance incontrôlable et la photo d'un acteur inconnu qui jouait un rôle dans la distribution de "Liberty-Bar". Etrange quand on connaît le penchant des hommes de théâtre pour le cabotinage …
C'est d'ailleurs sa production théâtrale qui contient le plus d'indices permettant de mettre en évidence la supercherie. (Cette production fera l'objet d'une étude spécifique).

Au Fleuve Noir il signe James Carter en "Spécial Police", alors que la série est sensée publier des auteurs français : pourquoi abandonner Frédéric Valmain (qui ne serait qu'un pseudo de Frédéric Baulat ) ? si ce n'est pour éviter que le lecteur ne fasse la relation trop évidente avec un autre Frédéric, (Dard), qui cesse au même moment de produire sous sa signature des romans qui décrivent (trop) bien les comportements inspirés par le nouveau milieu social dans le quel il gravite désormais.

Frédéric Dard déclare dans Je le jure p141, " Je pense sans me vanter, avoir écrit quatre ou cinq histoires très bonnes dans ma carrière de Frédéric Dard. Dans les classiques du roman policier, il y a toujours deux ou trois bouquins de moi. ", or lorsque le Fleuve Noir dont il est l'auteur vedette sort une série rétrospective "Polars 50", manquerait-il à l'appel ? pas tout à fait car le 36em et dernier titre est un James Carter qui n'a produit sous ce nom qu'a partir de 1966... et l'on peut partir à la recherche des autres titres dont il est l'auteur dans cette série sous d'autres pseudos.
(je pense en avoir trouvé deux).

Je peux répondre par avance à l'argument concernant l'impossibilité d'écrire tous ces titres en même temps que les San-Antonio/Dard, car l'apparition de la signature Carter coïncide avec la disparition de celle de Frédéric Dard, et ne change pas les chiffres de production antérieure globale y compris les quelques titres qu'il signe Frédéric Dard après 1966 et reste compatible avec sa capacité d'écriture époustouflante. (étude sommaire jointe).

Un de mes correspondants m'envoie L'école des Escrocs, roman signé Frédéric Valmain publié en 1963 dans la collection Champagne (A.Fayard col. humoristique dirigée par Hélène Tournaire N°18 ). " L'ouvrage est intéressant : Illustrations de Henry Blanc (qui faisait les histoires du Commissaire dans France-Soir), livre dédié au professeur Edmond Locard, de Lyon qui fut un grand ami de Frédéric Dard, et histoire d'une femme qui tient un magasin de farces et attrapes et s'associe avec deux brigands pour faire des escroqueries… La mère de Frédéric Dard tenait une boutique de farces et attrapes à Lyon (qui fût rachetée par Dard en novembre 1966), ce qui fait beaucoup …
A la lecture de ce livre agréablement troussé dans le genre difficile qu'est le récit humoristique, non seulement la manière de Dard est omniprésente, mais encore je relève à la 1er page : " Je suis née en janvier 1921 ", un des personnage s'appèle Fortuné Tatzi, nom réutilisé par San-Antonio en 1985 pour Bacchanale chez la mère Tatzi. Cela fait cinq coïncidences en un seul livre, quelle probabilité reste-t-il pour que l'auteur et F.Dard puissent être deux personnes différentes ?

Un autre correspondant attire mon attention sur le fait qu'a partir des années soixante, Frédéric Dard est lié par contrat à De Caro, contrat qui l'oblige à publier un certain nombre de San-Antonio par an et à publier en exclusivité au Fleuve Noir ; il n'y a pas là de contradiction avec le retour de Frédéric Valmain au Fleuve sous le pseudo de James Carter…

La préface le la pièce Le Verdict, signée James Carter et publiée dans
" A la Page " N°66 de décembre 1969 tente de rattraper la préface du N°27 sur ce thème : " Il y a certains mystères dans le monde de l'édition : celui de James Carter, alias Frédéric Valmain … ou le contraire en est un.
En 1965 Frédéric Valmain (auteur de quatorze pièces de théâtre - deux d'entre elles, en particulier, ont été publiées dans 'A la Page' ; Meurtre en Fa dièse, et Le procès de Maître Ferrari, - et d'une dizaine de romans, édités par la librairie Arthème Fayard, dont la plupart ont été portés à l'écran) tenté par les fabuleux tirages de la collection " Spécial Police " du FLEUVE NOIR, présenta quelques manuscrits à cette maison d'édition. Ces manuscrits furent reçus, mais à la condition que le pseudonyme de l'auteur devienne une exclusivité du FLEUVE NOIR. D'autres contrats, en particulier avec la Librairie Arthème Fayard étant en vigueur, Frédéric Valmain dut choisir un autre pseudonyme pour ces romans-là, et c'est ainsi qu'au cours de ces dernières années parurent plusieurs romans aux éditions du Fleuve Noir, sous le pseudonyme de James Carter dont L'ère des bijoux et Les Truqueurs.
James Carter bénéficiant d'une popularité grandissante, décida de signer sa pièce Le Verdict de son nouveau pseudonyme.
Comme d'autres auteurs, comme Frédéric Dard (San-Antonio) ou comme Jacques Laurent (Cecil Saint -Laurent) par exemple, Frédéric Valmain et James Carter, mènent depuis, deux carrières parallèles ".
Cette préface reconnaît que certains lecteurs se posaient des questions ...

Michel Lebrun a parlé des James Carter : il n'a pas aimé, il l'a dit, c'est son droit, c'est lui qui a livré à la postérité le nom de Paul Baulat de Varenne repris par Périsset et par d'autres. Michel Lebrun comme beaucoup connaissait la personne Frédéric Baulat, ainsi que la résidence familiale de F. Dard à la Varenne …où son père épousa la grand-mère de sa femme.(citation de F.D. tirée d'un interview du Mystère Magazine N° 308).
N'est-ce pas là le clin d'œil d'un initié qui ne vend pas la mèche ?

Je ne reviens pas sur les titres présentant des analogies avec ceux très efficaces utilisés par Dard et San-Antonio faisant l'objet d'un numéro spécial des " Amis de San-Antonio ",
je passe sur les sujets avec leur réutilisation récurrente (La Baraka et le dragon de Cracovie commencent dans l'intimité d'Hitler, il faut oser... ; Docteur Jekyll and Lady Hyde fait pendant à la pièce Dr Jekyll et Mr Hyde au grand guignol),
Je reviendrai enfin sur l'emploi de mêmes mots peu courants qui reviennent aussi bien chez F. Dard que chez J. Carter.
Je ne passe pas sur l'utilisation de la langue de San-Antonio lors de la dernière apparition de James Carter/Frédéric Valmain (Spécial Police N°1953) Une sacrée fripouille, appréciez vous même : p18 : brichetonner, pignocher
P28 : louchonne, matritorne, p30 : la chosette, p38 : au lieu de se ventrouiller sans muser, il préféra pipailler une cigarette, p46 : brise-nouille pour dentier, p50 : clabauda, p53 : majestueuse gidouille, p54 : soulager son cyclope (pour pisser), p57 : embabouiner son prochain, p86 : cabasser sa montre, p92 : litaniser…

La citation de Frédéric Dard par François Rivière relatant une réponse à Dominique Arly impressionné par le rythme d'écriture infernal de Frédéric qui, malicieux, lui rétorque : " Tu sais, je suis comme un type qui fait tourner des assiettes sur des bâtons : si je m'arrête, je suis fichu ! ", s'applique parfaitement à cet enchaînement : l'apparition de la signature James Carter remplaçant celle de Frédéric Dard, pratiquement en sommeil à partir de 1966 (les cadence d'écriture n'ont pas changées), et l'on pourrait même se poser des questions sur l'écriture de textes d'espionnage, pratique commencée par Dard sous la signature Frédéric Charles et qui semble avoir été abandonnée, mais qui sait ? ceci est une autre histoire …
Le reste, vous le trouvez dans la première partie de mon étude que je n'ai pas voulu alourdir démesurément.

J'espère vous avoir convaincu ou du moins intrigué, après la disparition de Frédéric Dard il est temps de divulguer cette information sur l'œuvre de notre auteur contemporain le plus important et de rompre la conspiration du silence qui l'entoure. Bien sur tout élément que vous voudrez me communiquer , (pour ou contre), m'intéresse, et je vous remercie de me faire connaître vos réflexions.

Thierry Cazon

Autre article

http://www.action-suspense.com/2014/07/frederic-valmain-la-mort-dans-l-ame-1958-james-carter-l-age-de-deraison-1977.html

Frédéric Valmain : La mort dans l'âme (1958) + James Carter : L'âge de déraison (1977)

Selon les rares infos à son sujet sur Wikipedia, Frédéric Valmain est né le 31 janvier 1931 à Alger, et mort le 9 juin 2003 à Champigny (Val-de-Marne). Il était acteur, scénariste, et écrivain. De son vrai nom Paul Baulat, il commence à tourner de tout petits rôles, avant de rencontrer le succès au théâtre avec “Liberty bar” qui est aussi sa première œuvre théâtrale. [Cette pièce est très souvent attribuée à Frédéric Dard, notamment par Thierry Cazon en 2001, Pierre Assouline en juillet 2008 et par Alexandre Clément en 2012. "Le flamenco des assassins" fut adaptée au cinéma sous le titre de "Johnny Banco", ce roman aurait pu également avoir été écrit par Frédéric Dard.]

Par contre, nul ne semble contester que “La mort dans l'âme” (1958) soit effectivement un roman de Frédéric Valmain. La tonalité est fort éloignée de ce qu'écrivait Frédéric Dard durant ces années-là, même s'il variait son style, à l'évidence. Un jeune héros désinvolte et arriviste navigue entre plusieurs femmes, commettant un crime pour assurer son avenir en profitant des circonstances.

Dans la collection Spécial-Police du Fleuve Noir, Valmain aurait utilisé le pseudo de James Carter. Ce qui est aussi partiellement contesté par ceux qui voient l'ombre de Frédéric Dard partout. J'ai testé plusieurs James Carter, dont “L'âge de déraison” (1977). On est là encore à mille lieues de l'inspiration et de l'écriture de Frédéric Dard. Une bonne petite intrigue avec une narration fluide, pour un suspense agréable comme il s'en est publié beaucoup alors. Grosse différence avec les quatre San-Antonio parus cette année-là.

Pour ma part, sans la moindre polémique, je ne suis pas du tout convaincu que Frédéric Valmain et James Carter aient été des pseudos de F.Dard, ce qu'il a d'ailleurs nié. Donc, ne payons pas au prix fort ces romans anciens, d'un bon niveau mais pas forcément attribuables à Frédéric Dard.

Frédéric Valmain : La mort dans l'âme (Arthème Fayard, 1958)

Quartier Latin, à la fin des années 1950, au temps où tout le monde chante “Les feuilles mortes” de Prévert. Sacha Terbieff est un jeune peintre de Saint-Germain-des-Prés, qui ne cache pas son ambition de se faire un nom. Ce trentenaire est en couple depuis une année avec Anna-Maria Pétracci. Italienne de vingt-trois ans, elle suit des cours à la Sorbonne. Elle est moins attachée au succès que son compagnon. Trois toiles de Sacha sont exposées parmi d'autres dans une galerie. Dès le vernissage, se présente une acheteuse. Il s'agit de la comtesse Frieda Wrumberg, belle quadragénaire (avouant trente-cinq ans) aux grand yeux bleus acier, au fin visage triangulaire cerné de cheveux blonds et courts.

La comtesse n'est pas seulement ravissante, elle est surtout riche. Elle demande à Sacha de lui livrer les toiles chez elles, après la durée de l'expo. Au 13 Quai de Boulogne, la demeure de Frieda Wrumberg respire le luxe. Les sculptures qu'elle réalise sont peu au goût de Sacha. Ce qui ne l'empêche pas de sortir ce soir-là avec Frieda et son toutou, le pékinois Jiky. Sacha la laisse mijoter ensuite pendant une semaine, avant qu'ils ne deviennent amants. Jalouse d'Anna-Maria, Frieda propose le mariage à Sacha. Ce qu'il accepte vite, quittant brutalement sa compagne. C'est en Italie que les nouveaux mariés passent leur voyage de noces. Se disant souffrante, Frieda provoque leur retour anticipé. Elle avait envie d'un ravalement de façade, tout simplement.

Ces caprices de Frieda rendent lourde l'ambiance chez elle. Sacha renoue avec Anna-Maria. Postant une lettre d'adieu à Frieda, le peintre part en voiture sur la Côte d'Azur avec sa compagne. Ils ont un accident, provoquant la mort d'Anna-Maria. Comme elle portait au doigt l'alliance de Frieda, Sacha en profite. Se disant que son épouse à entraîné une malédiction sur lui et sa compagne, il s'en débarrasse. Il prépare une fausse version pour M.Spizer, l'homme d'affaires de Frieda, qui organise les funérailles et la succession. Pour les obsèques, arrive de Londres la fille de la défunte, Nadja, vingt-cinq ans...

James Carter : L'âge de déraison (Fleuve Noir, 1977)

Joseph Picock est professeur dans les environs de New York. Il est marié à Gloria depuis une vingtaine d'années. Cette ancienne strip-teaseuse est devenue une femme d'intérieur exigeante, ce qui ennuie son époux. C'est ainsi qu'un jour, Picock la fait tomber dans les escaliers. Moitié-accident, moitié-crime, le digne époux de Gloria n'est nullement inquiété. Le voilà enfin libre. De son côté, Orso Chérubini est libre, lui aussi. Car il vient de s'évader de prison, se faisant passer pour malade. Chérubini fut le compagnon de Gloria, avant son mariage avec Picock. Il a été emprisonné durant un quart de siècle à Sing-Sing. Comme Gloria n'avait jamais cessé de lui écrire pendant son incarcération, le FBI pense que l'évadé va chercher à la contacter pour faciliter sa fuite.

Jo Picock n'a pas l'intention d'alerter les flics lorsque Chérubini débarque chez lui. Bien au contraire, ça mettra un peu de piment dans la vie de ce lecteur assidu de polars. Il compte protéger Chérubini, le cacher. Touché par cet accueil, l'ex-Ennemi public n°1 lui fait même des confidences sur le pactole qu'il a planqué. Chérubini est plus souffrant qu'il ne le pensait lui-même, au point de trépasser. Picock se demande alors s'il ne serait pas capable de jouer son rôle, afin de retrouver l'endroit où se trouve le butin de Chérubini. Les deux hommes se ressemble plus ou moins. Après tout ce temps, personne ne se souviendra des traits exacts de Chérubini.

Il contacte un certain Willy, qui détient le renseignement recherché. Avocat véreux, Willy l'invite à séjourner quelques jours chez Madame Bijou, patronne d'un bordel de luxe. Sans tarder, Picock tombe sous le charme de la séduisante Yoko. Cette domestique ne semble pas insensible à sa prestance de quinquagénaire. On ne peut guère se fier à Willy. Quand l'avocat va se montrer gourmand, Yoko choisira d'aider Picock. Le couple va bientôt se diriger vers la Californie, en quête du trésor de Chérubini. Il se trouve du côté de San Luis, sur le boulevard du front de mer, dans un vieux fortin puant. Malgré sa maturité, Picock risque de se montrer aussi naïf qu'un enfant de chœur...

 

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